Un article de John Burrascano, commissaire industriel, PME MTL Ouest-de-l’Île, le 12 juin 2025
Comme chacun sait, l’économie québécoise a connu de nombreux hauts et bas au cours de son histoire contemporaine, et ce, pour de multiples raisons. Nous souhaitons toutefois nous concentrer sur la performance économique de la province depuis 2019.
Les économies canadienne et québécoise, ainsi que la plupart des grandes économies mondiales, ont connu trois bouleversements économiques et ralentissements importants depuis la fin 2019.
Premièrement, en 2019-2020, la crise de la COVID-19 et ses conséquences.
Deuxièmement, peu après la crise de la COVID-19, une forte inflation a nécessité une politique monétaire visant à maîtriser les pressions économiques inflationnistes. La Banque du Canada a alors relevé ses taux d’intérêt à dix reprises entre mars 2022 et juillet 2023, les portant à 5 %, son plus haut niveau en 22 ans, provoquant ainsi un ralentissement économique.
Après avoir constaté que l’inflation était maîtrisée à 2 %, qu’il y avait une offre excédentaire dans l’économie, un ralentissement de la croissance économique et une hausse du chômage, la Banque du Canada s’est sentie prête à abaisser les taux d’intérêt pour relancer l’économie canadienne. Elle l’a fait entre juin 2024 et mars 2025 – les taux étaient à 2,75 % en juin 2025.
Au cours des derniers trimestres précédant la deuxième victoire électorale de Donald Trump en novembre 2024, le sentiment général du milieu des affaires était généralement plus optimiste, car le contexte de taux d’intérêt élevés s’était atténué. Cela a progressivement renforcé la confiance des entreprises et des consommateurs.
Sur le front de l’immobilier industriel à Montréal et dans l’Ouest-de-l’Île, la situation économique plus positive en 2025 a amené les acteurs du secteur immobilier commercial montréalais à conclure que, selon toute vraisemblance, la demande pour ce type de biens immobiliers devrait continuer à augmenter progressivement et l’année 2026 devrait être une année record pour le marché immobilier industriel, car l’économie dans son ensemble devrait atteindre son apogée.
Le troisième ralentissement économique depuis la fin de 2019 est lié à la victoire électorale de Donald Trump en novembre 2024. Cette victoire a modifié les attentes positives concernant l’économie et le marché immobilier industriel, principalement en raison de la menace de la nouvelle administration américaine d’imposer des droits de douane élevés sur les produits canadiens exportés vers le marché américain. Cette situation a affecté l’état d’esprit des entreprises et des consommateurs et est à l’origine du récent marasme économique en Amérique du nord et à l’échelle mondiale.
Performance économique prévue du Québec
Selon Desjardins (3 juin 2025 : 5)(1), en 2025, l’économie de la province, en effritement, devrait être moins performante que la moyenne nationale canadienne. Les perspectives économiques à court terme sont moroses. Il est probable que la province entre en récession technique au deuxième trimestre en raison de la baisse des exportations et de l’anémie des investissements du secteur privé, principalement à cause des tarifs douaniers imposés par les États-Unis. De plus, le ralentissement économique du Québec s’accompagne d’une prévision de croissance démographique inférieure à la moyenne nationale, d’une croissance de l’emploi plus faible et d’une hausse du taux de chômage à plus de 6,5 % d’ici la fin de l’année.
En effet, la province est soumise aux tarifs américains qui touchent son important secteur manufacturier, ses produits minéraux, ses aéronefs et ses produits forestiers, en particulier le secteur de l’aluminium, qui a subi une augmentation de 25 %, laquelle a doublé pour atteindre 50 % le mercredi 4 juin dernier. Ce taux de 50 % s’applique également à l’acier.
Le tableau ci-dessus confirme une croissance atone du PIB pour 2024, et la croissance économique devrait s’aggraver en 2025 pour tous les États sélectionnés inclus dans le tableau, bien en deçà du seuil de 2 % considéré comme un taux de croissance économique modéré. (1)
Marché des bâtiments industriels à Montréal et dans l’Ouest-de-l’Île
Au cours du premier trimestre de l’année en cours, le marché immobilier industriel montréalais a été marqué par une incertitude économique inquiétante découlant de la guerre tarifaire entre les États-Unis et le Canada.
Ce conflit commercial est source de difficultés pour les locataires du secteur manufacturier, car la hausse constante du coût des matériaux et de la production, pour beaucoup, réduit les marges de profit. Jones-Lang-LaSalle (2025:1) confirme que le marché industriel est confronté à une baisse de la demande d’espace. Les incertitudes des locataires découlant du conflit tarifaire nord-américain exercent une pression sur les propriétaires pour qu’ils réduisent les loyers.
Savills (T1, 2025:1) rapporte que les locataires réévaluent leurs besoins en espace. L’entreprise indique également que la région métropolitaine de Montréal a enregistré une augmentation du taux d’inoccupation de 130 points de base (PB) par rapport à 2024. Laval et l’Ouest-de-l’Île ont connu la plus forte hausse du taux d’inoccupation entre 2024 et 2025, soit respectivement 360 PB et 170 PB.
On s’attend à ce que Montréal soit davantage touchée par une absorption spatiale nette négative en 2025 alors que le marché industriel s’ajuste à l’arrivée sur le marché d’environ 2,3 millions de pieds carrés d’anciens espaces d’Amazon et à la guerre tarifaire.
Tarification(2)
Au quatrième trimestre de 2023, le taux de location net moyen demandé pour tous les types d’installations industrielles dans l’Ouest-de-l’Île était de 17,15 $ le pied carré (incluant Lachine, Vaudreuil et Saint-Laurent). Au quatrième trimestre de 2024, ce taux est diminué à 15,22 $ le pied carré et, au première trimestre 2025*, le taux était de 15,26 $ le pied carré, soit une très légère augmentation de 0,26 % entre la fin de 2024 et le premier trimestre de 2025.
À titre comparatif, le taux de location net moyen demandé dans la région métropolitaine de Montréal au quatrième trimestre de 2023 était de 16,42 $ le pied carré et au quatrième trimestre de 2024, de 15,24 $ le pied carré. Au premier trimestre de 2025*, le tarif était de 14,85 $ le pied carré, soit une diminution de 2,6 % entre la fin 2024 et le T1 2025.
Concernant le prix de vente moyen demandé pour les bâtiments industriels de tous types dans l’Ouest-de-l’Île (incluant Lachine, Vaudreuil et Saint-Laurent), on pouvait acheter une installation industrielle 280,02 $ le pied carré au quatrième trimestre de 2023. Au quatrième trimestre de 2024, une telle installation pourrait être négociée pour 300 $ par pied carré. Au T1 2025, les prix ont été réduits à 277 $ le pied carré, soit une baisse des prix de 7,7 % entre le quatrième trimestre de 2024 et le premier trimestre de 2025*.
* À noter que pour le T1 2025, le chiffre ne tient pas compte de la région de Vaudreuil puisque la source a modifié la manière dont elle procède à ce calcul.
(2) CBRE. Figures—Montreal Industrial, T4 2023 et T4 2024, T1 2025. Par CBRE Recherche.
Encore une fois, à des fins de comparaison, les prix, tels que décrits dans le paragraphe ci-dessus pour la région métropolitaine du grand Montréal, étaient de 257,48 $ le pied carré au quatrième trimestre de 2023, de 246 $ au quatrième trimestre de 2024 et de 216 $ au premier trimestre de 2025*. Par conséquent, il y a eu une baisse prix de 12,2 % entre le quatrième trimestre de 2024 et le T1 2025.
Taux d’inoccupation industriel(3)
Au quatrième trimestre de 2022, le taux d’inoccupation des espaces industriels de l’Ouest-de-l’Île (excluant Lachine, Vaudreuil et Saint-Laurent) était de 0,9 % et a augmenté à 4,6 % au T4 2024. Le taux au T1 2025 a grimpé à 5,9 %.
Pour Lachine, le taux d’inoccupation des espaces industriels au T4 2022 était de 0,5 % et est passé à 3,8 % au T4 2024. Le taux a très légèrement diminué pour atteindre 3,5 % au T1 2025.
À titre comparatif, le taux d’inoccupation pour la région métropolitaine du grand Montréal était de 0,6 % au T4 2022 et a augmenté à 4 % au T4 2024. Au T1 2025, le taux du grand Montréal s’est de nouveau accru pour atteindre 4,2 %.
(3) Colliers International. Montreal Industrial Market Report, T4 2016-T4 2024 et T1 2025.
Résumé et conclusion
Au cours des cinq dernières années et demie, l’économie du Québec a été frappée par trois événements économiques majeurs. Premièrement, la crise de la COVID-19. Deuxièmement, une forte inflation et des taux d’intérêt élevés visant à la maîtriser. Enfin, les importantes augmentations des tarifs douaniers imposées par la nouvelle administration Trump au Canada, au Québec, en Europe, en Chine et en Inde. Ces trois épisodes de ralentissement économique, notamment le plus récent concernant les tarifs américains, n’ont pas permis à l’économie canadienne et québécoise de prendre son essor.
L’économie québécoise est amorphe et stagnante, et il est probable qu’elle entre en récession technique au cours du second semestre de 2025. Les chiffres définitifs du PIB pour 2024 pour le Canada, le Québec et l’Ontario se situent bien en deçà du seuil de 2 % considéré comme une croissance économique modérée, et les prévisions indiquent une aggravation en 2025.
L’impact d’une performance économique globale plus faible du Québec sur l’immobilier industriel à Montréal et dans l’Ouest-de-l’Île a jeté les bases d’une baisse confirmée de la demande pour ce type d’espace. Le manque de demande a incité les propriétaires à baisser leurs loyers et leurs prix de vente.
Le manque d’absorption spatiale des espaces industriels est l’une des principales raisons de la hausse des taux d’inoccupation depuis la fin de 2023 dans l’Ouest-de-l’Île et le grand Montréal.
La confiance des entreprises et des consommateurs a diminué et, tant qu’une certaine stabilité économique ne sera pas rétablie, la situation du secteur immobilier industriel à Montréal risque de se détériorer avant de s’améliorer.
D’importants progrès politiques et économiques concernant les tarifs commerciaux américains doivent être réalisés avant que la reprise économique tant souhaitée ne s’amorce, contribuant ainsi à restaurer la confiance des entreprises et des consommateurs à des niveaux permettant à la demande d’espaces industriels de rebondir.
Bibliographie
CBRE Recherche. Figures—Montreal Industrial, T4 2023 et T4 2024, T1 2025.
Colliers International. Montreal Industrial Market Report, T4 2016-T4 2024 et T1 2025.
Jones-Lang LaSalle. “Stakeholders adopt cautious stance amid rising trade tensions.” Montréal Industrial Insight, T1 2025. Copyright, Jones-Lang-LaSalle IP, Inc. 2025.
Savills. “Montreal—Market correction continues despite positive absorption; uncertainty remains top of mind.”, T1 2025. Copyright, Savills, 2025.
Desjardins, études économiques, 2025. « Les provinces en position inégale dans un contexte commercial changeant », Point de vue économique. Publié par Laura Gu, économiste senior, 3 juin 2025, page 7.
Desjardins, études économiques, 2025. “Tariff De-escalation Leads to a Slight Improvement in the Economic Outlook.”
Economic and Financial Outlook. Publié par Jimmy Jean et al., 22 mai 2025.
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